Itchi gatsu
08 février 2005

Dès mon retour d'Okinawa, une grande épreuve m'attend: un entraînement spécial qu'on appelle ''kangeiko'' ou ''cold training''. Tous les élèves de mon école de karaté se retrouvent un dimanche matin, sous un ciel gris, le mercure frôlant les zéros degrés Celsius. Uniquement vêtus de notre gi (costume de Karaté) et nous entamons une course de 5 kilomètres. Il fait froid, très froid, mais après quelques centaines de mètres le froid ne nous dérange plus, nous sommes trop engourdis pour vraiment le sentir. Un peu de pluie et de neige se mêlent de la partie. Nous longeons l'océan avant d'arriver sur une grande plage où nous pouvons voir la mer, une mer qui se déchaîne. Jusqu'à date ce n'est pas si pire, il fait froid mais c'est endurable. Sur la plage nous enlevons nos souliers pour faire un entraînement. Le sable est tellement froid que je ne sens rien, sauf de la douleur. L'entraînement n'est pas trop long et se termine par quelques exercices les pieds dans l'eau qui paraît presque chaude. Ensuite nous nous réchauffons à l'aide d'un grand feu et d'une bonne soupe chaude. J'aimerais être spectateur et pouvoir prendre des photos, l'océan offre un spectacle vraiment impressionnant. En début d'après midi nous nous retrouvons au dojo pour une petite fête et une confection de gâteau mochi. Je suis bien content d'avoir fait l'expérience d'un ''kangeiko'', le karaté est vraiment une excellente manière de découvrir la culture japonaise.


Nouvelle maison

En octobre dernier Yuko et moi avons mis un terme à notre relation. Nous sommes restés bons amis et j'ai continué d'habiter dans la maison de sa grand-mère. Même si tout allait bien avec Yuko, j'ai quand même cherché une nouvelle place où habiter. Une madame qui suit des cours d'anglais à l'école où j'enseigne et qui est la cousine de M. Ekida a accepté de me recevoir chez elle. Après un ballet diplomatique afin d'assurer que tout soit correct avec sa famille, j'ai finalement déménagé, à la mi janvier, chez madame Ruriko Ohata. La maison est vraiment bien, j'occupe la chambre de son fils qui étudie aux Etats-Unis. Elle a un autre fils qui travaille à Tokyo et son mari est décédé il y a deux ans. Une des premières choses qui m'a un peu surpris c'est l'autel érigé en l'honneur de son mari. Chaque soir, à l'heure du souper on va déposer un petit bol de riz comme offrande. La majorité des maisons japonaises n'ont pas de chauffage central et sont plutôt mal isolées. Il fait assez froid ces temps-ci (0-5 degrés Celsius). Alors le matin, ce n'est pas très agréable de se lever et de devoir attendre 10 ou 15 minutes avant que les petites chaufferettes au kérosène réchauffent la pièce. Brrrr… Mais bon, dans un mois l'hiver sera terminé. Je pense que dans cette nouvelle demeure, j'aurai une très bonne occasion d'améliorer mon japonais et en plus je vais sans doute gagner quelques jalons en cuisine japonaise.


Maître Yoshino

La dernière fin de semaine de janvier, mon maître de karaté, le très respectable M. Toyota m'a invité à accompagner les membres élites de notre dojo afin d'aller rencontrer le grand maître Yoshino et d'écouter ses enseignements. M. Yoshino est le maître de mon maître. Il a une réputation internationale et est souvent invité dans d'autres pays pour aller partager ses connaissances avec les plus grands maîtres. C'était donc tout un honneur que je pouvais difficilement apprécier à sa juste valeur. Nous sommes partis, 5 ceintures noires, 2 brunes et moi vers la préfecture de Hiroshima ou M. Yoshino a un petit dojo très modeste compte tenu de son rang. A première vue, il m'a semblé sympathique et m'a donné l'impression de sagesse. Je fus surpris de voir le respect hors du commun que mes compagnons lui ont voué. Nous avons soupé en sa compagnie dans sa demeure, bien que je ne saisissais pas grand-chose de la discussion, je pouvais voir que les membres de mon dojo écoutaient avec une très grande attention les propos du maître. À l'occasion, M. Toyota m'expliquait ce dont il était question. La souper s'est terminé tard dans la nuit. Nous avons dormi dans le dojo. Au matin, déjeuné de riz et soupe miso avant de commencer l'entraînement. Je pensais uniquement regarder, car le niveau d'enseignement dépasserait sans doute mes capacités, mais j'ai pu suivre un peu. Le grand maître enseignait des Katas, séries de mouvements représentant une série de parades et d'attaques sur des ennemis imaginaires. J'ai pu apprendre un nouveau Kata : 'Shinta'. Il se référait souvent à de vieux livres ou des manuscrits pour corriger certains mouvements des mes coéquipiers. Certains Katas étaient d'origines chinoises et étaient très durs à exécuter. Vers la fin de l'entraînement ils m'ont offert un petit cours sur le maniement du Katana. M. Yoshina possède une vaste armurerie car en plus d'être un maître de karaté, il possède beaucoup de connaissances d'autres arts martiaux. Nous avons terminé la rencontre avec un succulent dîner avant de repartir vers Masuda. Ce fut une rencontre vraiment exceptionnelle, je peux me considérer très chanceux d'avoir pu rencontrer, selon certains, un des 5 plus grands maîtres de karaté du Japon.



Photo de la fin: mon dojo et ses élèves